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Photo du rédacteurValérie Mangion

Le deuil familial.


Dans un précédent article, je vous parlais du processus par lequel passe une personne endeuillée. 

Bien sûr, il y a le travail de deuil que nous devons tous faire, individuellement, lorsque l’on perd un être cher. 

Mais se limiter à cet aspect du deuil, dans notre société où les valeurs familiales occupent encore une place prépondérante, me paraît fortement réducteur. Comprendre ce que l’on vit personnellement balise d’une certaine façon notre cheminement personnel, mais il n’explique en rien l’impression de chaos que l’on peut ressentir au sein de la famille. C’est tout le système familial qu’un décès va déséquilibrer et mettre à l’épreuve d’une crise. 



Bien que nous puissions déplorer le manque de littérature abordant le deuil selon une approche systémique, nous y retrouvons quand même une description en 4 étapes[1] qui me semble pertinente et que je voulais vous présenter. 


 


La première étape est l’acceptation familiale de la perte. Celle-ci revêt une dimension fortement sociale, puisqu’elle concerne tous les rituels funéraires (veillée, enterrement…) qui permettent à la fois d’annoncer le décès, d’en favoriser l’assimilation et l’acceptation, et de créer un cadre propice et adapté à l’expression des émotions. Émotions qui, or contexte de « deuil », peuvent être tues en raison de la non-désirabilité sociale.



 


La famille passe ensuite par une réorganisation de la communication interne et par une redistribution des rôles familiaux.

Nous avons tous pu constater, après le départ d’un proche, combien les choses ont pu changer dans les interactions familiales. Parfois, le défunt était LE liant de toute la famille. Parce qu’il transmettait des nouvelles des uns aux autres ou parce qu’il organisait des réunions de famille par exemple. En son absence, voilà que la dynamique relationnelle change dans la famille; certaines relations se distendent, parfois jusqu’à la rupture, tandis que d’autres peuvent se renforcer.

La perte de ce proche menace la « base familiale de sécurité »[2], qui jusqu’ici garantissait une sorte de réseau relationnel d’attachement sûr et sécurisant, permettant à chaque individu d’explorer des relations avec chacun des autres et avec l’extérieur, tout en ayant la garantie de retrouver cette sécurité au sein de la famille. Il revient à ceux qui restent de surmonter cette crise en remplaçant le canal de communication autrefois constitué par le défunt, et en ré attribuant les rôles qu’il occupait. Cette redistribution se fera selon les aptitudes et capacités de communication des autres membres de la famille. La notion de tiers pesant[3] déterminera la complexité de cette tâche; selon la place plus ou moins importante qu’occupait le défunt au sein du système familial (il comptera alors comme tiers léger ou tiers pesant).


 




Une fois la communication interne réorganisée et rétablie, la famille, alors stabilisée, est de nouveau prête à s’ouvrir sur l’extérieur. La communication avec l’extérieur est importante car elle donne accès à un réseau de soutien, nécessaire à l’intégrité du système. La famille doit dès lors redéfinir de nouveaux canaux de communication avec l’extérieur, en redistribuant entre les vivants les rôles qu’occupait le défunt. 

Tous ces changements obligent le système à redéfinir les règles de son propre fonctionnement. 

Cette longue épreuve met la famille au défi de la flexibilité et de sa capacité à maintenir une structure définie. 









 

Après tous les changements et ajustements décrits dans les étapes précédentes, le deuil est réussi lorsque les membres de la famille retrouvent un sentiment d’appartenance à cette nouvelle famille, issue de l’ancienne, mais organisée de façon différente. Les rôles du défunt ont été redistribués, de nouveaux canaux de communication créés, de nouvelles alliances aussi parfois. À travers toute cette réorganisation, c’est le script familial[4] qui est modifié. À savoir, les règles implicites qui sous-tendent les rôles de chacun et le fonctionnement familial.


 

Ici encore, le deuil ne veut pas dire qu’on oublie la personne disparue, mais simplement que le système surmonte l’absence en se réorganisant pour que le défunt, bien que faisant toujours partie de l’histoire familiale, cesse d’influencer directement le fonctionnement de celle-ci. 




[1] Pereira R. (1998). Le deuil : De l’optique individuelle à l’approche familiale. Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseau, 20, 31-48.

[2] Byng-Hall, J. (1995). Rewriting Family Scripts : Improvisation and systems change. New York and London : Guildford Press.

[3] Goldbeter-Merinfeld, E. (1994). Tiers pesant et tiers absent dans le système. Thérapie familiale, 15, 373-380.

[4] Paesemans, C., (2006). Le deuil familial. Extrait de mémoire récupéré en février 2018, sur http://systemique.be.

 

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